Le son

La sonorité est une question qui a beaucoup hanté les arts visuels du XXe siècle, alors que les dispositifs d’enregistrement, de diffusion et de création sonore se développent constamment ; néanmoins cette voie reste assez confidentielle et encore inexplorée par nombre d’artistes.

Daniel Buren a mené des expériences sonores depuis ses débuts. Lorsqu’il expose avec trois autres artistes au Salon de la Jeune Peinture de 1967, tous les quatre fixent, dans la salle où ils exécutent leurs peintures en direct, un haut-parleur qui délivre ce message en trois langues : « Buren, Mosset, Parmentier, Toroni vous conseillent de devenir intelligents ! ».

L’artiste ne se contente plus de peindre, il parle directement au spectateur et cela est intégré dans l’œuvre. Ce ne sera pas la seule fois que l’on entendra la voix de Daniel Buren, qui décrira des actes ou lira des textes, comme dans certaines de ses vidéos et performances. Mais l’usage du son, ce n’est pas seulement l’adresse vocale. Parfois c’est de la musique qui est en jeu, qu’il s’agisse de collaborations (avec le groupe expérimental Loupideloupe) ou de sélections de musiques existantes. Et de manière régulière, le son intervient dans les travaux de Daniel Buren comme élément de mesure (la sonorité d’un espace donne des indices de son volume), ou de révélation (l’ouïe peut attirer la vue vers d’autres éléments : c’est le cas du bruit de l’eau qui s’écoule sous Les Deux Plateaux et qui dévoile le sous-sol, ou bien encore du circuit d'eau qui parcourait tout l'espace du moulin à Albi : A contre-courant, travaux in situ et en mouvement, en 2008).

Le son, instrument pour révéler l’invisible, permet surtout d’ajouter une dimension à l’œuvre d’art. Ce qui est entendu complète ce qui est vu, l’un ne pouvant se réduire à l’autre. Sons enregistrés (voix de l’artiste ou de proches), musique, son des éléments et des matériaux : il faut ajouter une quatrième présence sonore, en perpétuelle évolution, dans le travail de Daniel Buren : celle des lieux d’intervention, dont l’ambiance, incontournable, est toujours de fait intégrée à un travail in situ.