Refléter

Le reflet est l’un des éléments auxquels Daniel Buren a pu avoir recours dans ses dispositifs, au travers de miroirs, de matériaux réfléchissants ou de jeux d’eau. Sa première des propriétés est l’inéluctable inclusion de l’espace autour de l’œuvre (on ne peut pas refléter seulement l’œuvre), appuyant la position de l’artiste sur l’interrelation fondamentale entre l’objet et son contexte.

En outre, un reflet n’est jamais fixe, il est toujours dépendant de la position du regardeur : on retrouve là une autre idée défendue par Daniel Buren : aucun point de vue unique ne saurait être privilégié. Le miroir « contextualise » donc l’objet en fonction de la mobilité du spectateur : il y a une infinité de points de vue possibles, et ceux-ci sont toujours fragmentaires.

Dans certains cas enfin, l’usage du reflet offre un « effet spécial » : l’impression d’infini lorsque deux miroirs sont placés face à face, la multiplication du reflet dans les angles, l’annulation des frontières, ou encore la vision périscopique, qui offre un spectacle inédit et surprenant.

Au-delà de ces effets, Daniel Buren confie au miroir un vrai rôle, celui d’un « troisième œil », qui permet de voir en même temps ce qu’on a devant les yeux et derrière la tête. Ainsi le miroir « n’a pas forcément l’ambition de réfléchir quoi que ce soit, mais a plutôt l’intention de montrer des choses bien particulières, que seuls des miroirs peuvent montrer. J’irais même jusqu’à dire que le miroir ne rend jamais rien de manière mimétique, mais qu’il montre toujours quelque chose d’autre. De plus, il transforme l’espace et permet de voir plus et différemment. »

Refléter, c’est donner une autre façon de voir, dynamique, c’est aussi toujours renvoyer l’œuvre à autre chose, à l’extérieur, à son regardeur. La question du miroir a évidemment fasciné nombre d’artistes au XXe siècle, mais Daniel Buren puise ses références bien au-delà et évoque, avec le regret qu’ils n’aient pas subsisté, les « morceaux réfléchissants qui se trouvaient sur certaines des batailles d’Uccello » à la Renaissance.