© D.B. - ADAGP Paris
Points de vue
Comment regarde-t-on une œuvre ? Et son environnement ? Comment une œuvre engage-t-elle notre regard ? Comment un lieu regarde-t-il un autre lieu ? Qu’y a-t-il à voir à travers une fenêtre ? Les questions de points de vue7 sont multiples, et fondamentales dans l’histoire de l’art.
Au point de vue unique généralement employé par les artistes, Daniel Buren propose d’en substituer une multiplicité, laissant au spectateur la liberté de choisir sa propre perspective et d’en changer à sa guise. C’est pourquoi, à n’en pas douter, la meilleure approche de son art est la déambulation, chaque pas offrant une nouvelle vision de l’œuvre et du lieu avec lequel elle fait corps.
Daniel Buren oppose ainsi au point de vue « monoculaire, univoque et dictatorial » des tableaux utilisant la perspective linéaire de la Renaissance, par exemple, une « perspective réelle », mise en jeu à chaque instant par un spectateur actif. « Il y a non plus un ou deux points de vue fixés d’avance, mais une multitude, sans hiérarchie et sans commandement, qui se répondent, interfèrent, s’induisent les uns les autres, s’enrichissent, se contredisent. Chaque point de vue a un sens propre qui ne réduit pas les autres à néant. »
Comme pour les fresques italiennes, les Nymphéas de Claude Monet ou le Merzbau de Kurt Schwitters, le visiteur orchestre sa propre perception de l’œuvre et du site. Son expérience est unique, progressive et active (à la différence de celle offerte par la grande majorité des tableaux exposés dans les musées, face auxquels on demande au visiteur d’adopter un seul point de vue, frontal, sous peine de ne rien voir du tout).
Il y a d’ailleurs souvent un travail virtuel à faire en synthétisant plusieurs points de vue : un plan à imaginer, des lignes à relier visuellement et mentalement. En contrepartie de cette liberté, la vision que l’on a de l’œuvre est toujours fragmentaire, ce qui intéresse aussi Daniel Buren. Jamais on ne peut en avoir une appréhension globale, si ce n’est par la déambulation, enchaînement dynamique de points de vue personnels sur l’œuvre, mais aussi sur l’extérieur, le contexte.